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LES-IPI, le 27 avril 2016 Ă GenĂšve
I.ProcĂ©dure dâenregistrement
III.Législation «Swissness»
IV.ProcĂ©dure de radiation dâun enregistrement pour dĂ©faut dâusage de la marque
Le 27 avril 2016 sâest tenue la 14e édition du sĂ©minaire annuel organisĂ© conjointement par le Licensing Executive Society et lâInstitut FĂ©dĂ©ral de la PropriĂ©tĂ© intellectuelle, ayant pour thĂšme les «DĂ©veloppements rĂ©cents en droit des marques».
LâannĂ©e 2016 a Ă©tĂ© marquĂ©e par des changements lĂ©gislatifs et rĂ©glementaires de premier ordre en matiĂšre de marques, tant en droit suisse quâau niveau du droit de lâUnion europĂ©enne.
La journĂ©e a dĂ©butĂ© par la prĂ©sentation de M.P.-E. Ruedin, Docteur en droit, Greffier au Tribunal administratif fĂ©dĂ©ral. Ce dernier a prĂ©sentĂ© la jurisprudence du TAF en matiĂšre de procĂ©dure dâenregistrement et dâopposition.
La problĂ©matique du caractĂšre potentiellement trompeur des signes contenant une indication gĂ©ographique a Ă©tĂ© un thĂšme rĂ©current en 2015. Ruedin a notamment exposĂ© les arrĂȘts du TAF (B-5120/2013) et du TF (4A_357/2015) concernant le signe «Indian Motorcycle» pour des vĂȘtements. Le TF a confirmĂ© lâapprĂ©ciation du TAF en indiquant quâil ressort clairement de la combinaison des Ă©lĂ©ments «Motorcycle» et «Indian» («moto indienne») que le substantif dĂ©finit les contours de la marque et que lâadjectif porte exclusivement sur le nom «moto». Cette combinaison ne saurait suggĂ©rer aux consommateurs que les vĂȘtements sur lesquels elle est apposĂ©e proviendraient dâInde. Le vĂȘtement sur lequel le signe litigieux est apposĂ© est ainsi plutĂŽt perçu comme un simple support et le signe considĂ©rĂ© comme une rĂ©fĂ©rence Ă lâunivers des motos (et non comme une indication de provenance du vĂȘtement). Le TF ajoute que lâattente Ă©veillĂ©e est trĂšs proche de celle qui est suscitĂ©e par le renvoi Ă un Ă©vĂ©nement sportif ou culturel, cas qui entre dans lâune des exceptions prĂ©vues par la jurisprudence «Yukon», rendue en application de lâart. 47 al. 2 LPM. Les consommateurs sont en effet habituĂ©s Ă percevoir des produits tels que des vĂȘtements ou des vĂ©hicules comme des supports sur lesquels sont apposĂ©es les rĂ©fĂ©rences Ă ces organisations/Ă©vĂ©nements (par exemple: «GenĂšve Handball 2016 [fig.]»).
Il ressort des autres arrĂȘts prĂ©sentĂ©s par Ruedin que le TAF a rejetĂ© les signes «Luxor» pour des microscopes et des appareils pour la chirurgie ophtalmologique (TAF B-6503/2014), «Teutonia» pour des vĂ©hicules, poussettes, maroquinerie, meubles et vĂȘtements (TAF B-3117/2014) et «Hyde Park» pour des vĂ©hicules automobile et des modĂšles rĂ©duits de vĂ©hicules (TAF B-1785/2014). En revanche, la marque «Cortina (fig.)» a Ă©tĂ© acceptĂ©e pour de la maroquinerie et des vĂȘtements (TAF B-2925/2014). Dans le domaine des signes reprĂ©sentant un produit, le TAF a refusĂ© le «bouton Apple» au motif quâil ne sâĂ©carte pas des symboles habituels de fonctions gĂ©nĂ©ralement prĂ©sents sur les touches des produits en cause («Smartphones und Tablets») (TAF B-2418/2014). En revanche, le TAF a admis la marque figurative «Nilpferd» reprĂ©sentant un personnage pour des jouets en classe 28, estimant que ce signe est Ă de nombreux Ă©gards inhabituel et inattendu (TAF B-1920/2014) ce qui ne semble pas trĂšs cohĂ©rent avec la pratique actuelle.
Ruedin a analysĂ© les principaux arrĂȘts rendus en 2015 par le TAF. Une problĂ©matique rĂ©currente est celle du champ de protection qui doit ĂȘtre accordĂ© aux marques antĂ©rieures dotĂ©es dâun faible caractĂšre distinctif. En prĂ©sence dâun Ă©lĂ©ment commun faiblement distinctif, lâapprĂ©ciation du risque de confusion dĂ©pendra de lâimpact des autres Ă©lĂ©ments sur lâimpression dâensemble qui se dĂ©gage des marques. Le risque de confusion a ainsi Ă©tĂ© partiellement niĂ© entre les marques «swissix» et «IX Swiss» (TAF B-203/2014), niĂ© entre les marques «Nivea Stress Protect» et «Stress Defence» (TAF B-3005/2014) et niĂ© entre les marques «Street-One» et «streetbelt.ch» (TAF B-5389/2014). En matiĂšre de preuve du caractĂšre distinctif Ă©levĂ© en procĂ©dure dâopposition, le TAF a laissĂ© ouverte la question de savoir si la marque «YSL» bĂ©nĂ©ficie dâun champ de protection accru en relation avec des vĂȘtements dans la mesure oĂč Yves Saint Laurent nâa pas suffisamment rendu vraisemblable le fort degrĂ© de connaissance de cette marque par le public (TAF B-2296/2014, «YSL [fig.]/SL Skinny Love [fig.]»). En revanche, le TAF a admis le caractĂšre distinctif Ă©levĂ© de la marque «Victorinox» pour des montres («Armbanduhren») (TAF B-341/2013, «Victorinox/Miltrorinox») ou encore de la marque «Calida» pour des pyjamas et sous-vĂȘtements (TAF B-6732/2014, «Calida/Calyana»).


La journĂ©e sâest poursuivie avec la prĂ©sentation de M.E. Meier, vice-directeur de lâInstitut FĂ©dĂ©ral de la PropriĂ©tĂ© Intellectuelle. Ce dernier a mis en exergue les principaux changements applicables dĂšs le 1er janvier 2017, intĂ©grĂ©s dans le projet de rĂ©vision des directives de lâIPI, actuellement disponible sous le lien <www.ige.ch/fr/infos-juridiques/domaines-juridiques/marques/directives-en-matiere-de-marques.html>.
La nouvelle lĂ©gislation «Swissness» vise Ă renforcer la protection de la dĂ©signation «Suisse», de la croix suisse et des indications de provenance en gĂ©nĂ©ral. Lâune des innovations est la possibilitĂ© de faire enregistrer des appellations dâorigine protĂ©gĂ©es (AOP) et des indications gĂ©ographiques protĂ©gĂ©es (IGP) pour des produits non agricoles tels que les montres, cĂ©ramiques, textiles ou encore eaux minĂ©rales dans le nouveau «registre des indications gĂ©ographiques», rĂ©git par lâart. 50a LPM et la nouvelle Ordonnance sur les AOP et IGP pour les produits non agricoles. En outre, Ă partir du 1er janvier 2017, les indications de provenance pourront ĂȘtre enregistrĂ©es Ă titre de marque gĂ©ographique aux conditions prĂ©vues Ă lâart. 27a LPM et en dĂ©rogation Ă lâart. 2 let. a LPM. Cette marque gĂ©ographique pourra dĂšs lors servir de base Ă un enregistrement international, facilitant ainsi la protection Ă lâĂ©tranger. Selon lâart. 27d LPM, qui dĂ©finit les droits dĂ©coulant dâune marque gĂ©ographique, toute personne respectant les conditions prĂ©vues dans le rĂšglement peut utiliser la marque. Enfin, les signes publics suisses et Ă©trangers protĂ©gĂ©s seront dorĂ©navant publiĂ©s en ligne par lâIPI afin dâen faciliter la recherche.
Avec la nouvelle loi sur la protection des armoiries (LPAP), il sera possible dâenregistrer des marques dotĂ©es dâune reprĂ©sentation de la croix suisse ou dâun drapeau suisse pour des produits, sous rĂ©serve que lesdits produits proviennent effectivement de Suisse, et que cette mention soit prĂ©cisĂ©e dans le libellĂ©. Cette possibilitĂ© ne sâĂ©tend pas aux marques comportant les armoiries de la ConfĂ©dĂ©ration suisse ou un signe susceptible dâĂȘtre confondu avec cellesci, que ce soit en relation avec des produits ou avec des services. Des exceptions sont prĂ©vues lorsque la dĂ©posante est la ConfĂ©dĂ©ration suisse ou lorsque le dĂ©posant peut faire valoir son droit de poursuivre lâusage (art. 35 LPAP).
Le deuxiĂšme changement important de la pratique en matiĂšre dâenregistrement concerne les marques de services comportant une indication de provenance: la liste des services devra dorĂ©navant ĂȘtre limitĂ©e Ă la provenance gĂ©ographique, comme câest le cas actuellement pour les marques dĂ©posĂ©es pour des produits. Cette limitation, rendue nĂ©cessaire en raison de la modification de lâart. 49 al. 1 LPM, concrĂ©tise la volontĂ© du lĂ©gislateur de renforcer la protection des indications de provenance. Elle a en particulier un effet direct sur le champ de protection de la marque, de sorte que lâusage effectif de la marque pour des produits ou des services provenant dâun autre pays nâĂ©quivaut pas Ă un usage permettant dâĂ©viter la perte du droit Ă la marque (cf. TF 4A_357/2015, «Indian Motorcycle»).
RĂ©gie par les art. 35a ss LPM et les art. 24 ss OPM, cette nouvelle procĂ©dure a pour but de faciliter la radiation des marques non utilisĂ©es depuis une pĂ©riode ininterrompue de cinq ans, dans un souci de dĂ©sengorgement du registre. Cette procĂ©dure est ouverte Ă toute personne physique ou morale sans quâil soit besoin dâĂ©tablir un intĂ©rĂȘt particulier. La procĂ©dure de radiation sâapparente Ă la procĂ©dure dâopposition, de par sa nature administrative, le montant abordable de sa taxe, ainsi que les principes rĂ©gissant lâallocation des frais et dĂ©pens. La demande doit en particulier contenir une dĂ©claration prĂ©cisant dans quelle mesure la radiation est demandĂ©e, une motivation qui rend vraisemblable le dĂ©faut dâusage et les moyens de preuve (art. 24a OPM). Lorsquâune demande de radiation nâest pas manifestement irrecevable, lâIPI en donne connaissance au titulaire de la marque en lui impartissant un dĂ©lai pour prĂ©senter sa rĂ©ponse. LâIPI admettra une demande si le requĂ©rant rend vraisemblable le dĂ©faut dâusage et si le titulaire ne rend pas vraisemblable lâusage de la marque ou lâexistence de justes motifs pour le dĂ©faut dâusage. La question des effets de lâusage partiel de la marque est encore ouverte et fera lâobjet dâun workshop avec les associations de milieux intĂ©ressĂ©s en septembre 2016. Le projet actuel des Directives de lâIPI prĂ©voit la «solution minimale», câest-Ă dire que la marque serait radiĂ©e pour chaque produit ou service pour lesquels lâusage nâa pas Ă©tĂ© rendu vraisemblable.
M.D. HANF, membre du DĂ©partement CoopĂ©ration internationale et affaires juridiques de lâOffice de lâUnion europĂ©enne pour la PropriĂ©tĂ© Intellectuelle (EUIPO) a ensuite prĂ©sentĂ© les rĂ©formes lĂ©gislatives qui ont eu lieu au niveau communautaire ainsi que la jurisprudence communautaire.
La rĂ©forme vise notamment Ă amĂ©liorer lâefficacitĂ© et la cohĂ©rence du systĂšme de lâUnion europĂ©enne avec les lĂ©gislations nationales. HANF a exposĂ© les effets concrets des modifications substantielles du rĂšglement (CE) sur la marque communautaire (CE) 207/2009 (RMUE) sur la pratique. En matiĂšre dâobtention des droits, le RMUE permet dĂ©sormais le dĂ©pĂŽt dâune marque communautaire sans reprĂ©sentation graphique, et a introduit les marques de certification de lâUnion europĂ©enne (art. 74bis RMUE) Ă compter dâoctobre 2017.
En ce qui concerne lâĂ©tendue des droits, le nouvel article lâarticle 28 RMUE exige la clartĂ© et la prĂ©cision des produits et services lors du dĂ©pĂŽt et explicite quelles marques sont Ă©ligibles, quels types de termes peuvent ĂȘtre ajoutĂ©s, des exemples de termes acceptables pour chaque Ă©dition et classe de Nice et la procĂ©dure de dĂ©pĂŽt, dâexamen et de publication. Ă noter le dĂ©lai expirant le 24 septembre 2016 pour modifier le registre pour les titulaires de marques dĂ©posĂ©es avant lâarrĂȘt «IP Translator», soit avant le 22 juin 2012.
Concernant les motifs absolus, le RMUE en Ă©largit le catalogue puisque le motif de fonctionnalitĂ© de lâart. 7 § 1 (e), nâest plus limitĂ© Ă la forme du produit, mais est Ă©tendu à «dâautres caractĂ©ristiques». De plus, sont notamment exclues les marques qui porteraient atteinte Ă la lĂ©gislation de lâUnion ou des Ătats membres sur les AOP et les IGP. Concernant les motifs relatifs de refus, le dĂ©lai dâopposition pour les enregistrements internationaux est raccourci (quatre mois au total Ă compter de la republication par lâEUIPO, contre neuf mois avant la rĂ©forme). Lâart. 8 § 4 (a) RMUE prĂ©voit dĂ©sormais un motif relatif de refus spĂ©cifique pour les IGP et AOP. Par ailleurs, la pĂ©riode de carence concernant la preuve de lâusage est dĂ©sormais calculĂ©e Ă compter du dĂ©pĂŽt, et non plus Ă compter de la publication de lâenregistrement. Concernant les droits exclusifs, le titulaire de droits peut dĂ©sormais faire saisir les produits supposĂ©s contrefaisants en transit, ou encore faire interdire des actes prĂ©paratoires portant sur lâutilisation du conditionnement ou dâautres moyens (nouvel art. 9bis RMUE).
La question des signes contenant une indication gĂ©ographique sâest Ă©galement prĂ©sentĂ©e au niveau communautaire comme lâa rappelĂ© HANF. Ainsi, le TUE a confirmĂ© le refus de la Chambre de Recours dâenregistrer la marque «Monaco» en classes 9, 16, 39, 41 et 43, au motif que lâart. 7 § 1 (c) RMUE sâoppose Ă lâenregistrement de noms gĂ©ographiques (i) dĂ©jĂ connus et (ii) susceptibles dâĂȘtre utilisĂ©s en tant quâindications de provenance (T-197/13). De mĂȘme, la Chambre de Recours a refusĂ© le signe «Suedtirol» (R574/2013-G).
Les marques tridimensionnelles ont donnĂ© lieu Ă plusieurs dĂ©cisions. Ce sont ainsi vu refusĂ©s Ă lâenregistrement une reprĂ©sentation dâune salle de vente Apple (R2224/2015â1), des chaussures de rebond (T-390/14), et une forme de briquet (R 0924/2013â1), au motif que la forme ne diverge pas de maniĂšre significative des normes du secteur.
HANF a Ă©galement mis en exergue la dĂ©licate question de lâĂ©tendue du territoire Ă prendre en considĂ©ration pour rapporter la preuve de lâacquisition du caractĂšre distinctif par lâusage «dans lâensemble de lâUnion pour une partie significative du public pertinent». La preuve doit-elle ĂȘtre rapportĂ©e pour chacun des 28 Ătats membres pris individuellement, ce qui rendrait la tĂąche impossible en pratique, ou seulement dans les «principaux» pays? La jurisprudence du TUE ne semble toujours pas clairement Ă©tablie dans la mesure oĂč il a considĂ©rĂ© que la preuve nâavait pas Ă©tĂ© fournie alors quâelle nâavait pas Ă©tĂ© rapportĂ©e dans seulement 4 des 15 Ătats membres de lâĂ©poque (Danemark, Portugal, Finlande et SuĂšde) (T-359/12), mais que la preuve aurait pu, en principe, ĂȘtre rapportĂ©e avec des sondages pour 10 pays et une extrapolation aux 17 autres Ătats membres (T-411/14). Reste que la CJUE a clairement considĂ©rĂ© «quâil serait excessif dâexiger que la preuve dâune telle acquisition soit apportĂ©e pour chaque Etat membre pris individuellement» (C-98/11).
La mĂȘme question de lâĂ©tendue du territoire Ă prendre en considĂ©ration se pose en matiĂšre de preuve dâusage, suite Ă lâarrĂȘt de la CJUE «Leno Merken» (C-149/11) selon lequel le territoire europĂ©en doit ĂȘtre considĂ©rĂ© dans son ensemble, sans prise en compte des frontiĂšres des Ătats membres, et quâun usage doit avoir une importance Ă©conomique suffisante en relation avec le secteur dâactivitĂ©, peu importe le nombre de pays. Ainsi, lâusage dans un seul EM peut ĂȘtre suffisant, pourvu quâil ne soit pas symbolique (T-398/13).
Enfin, HANF a rappelĂ© que la pratique communautaire rejoint la pratique suisse en ce quâelle considĂšre aussi quâen prĂ©sence dâun Ă©lĂ©ment commun faiblement distinctif, lâapprĂ©ciation du risque de confusion dĂ©pendra de lâimpact des autres Ă©lĂ©ments sur lâimpression dâensemble suscitĂ© par les marques. Le risque de confusion a ainsi Ă©tĂ© niĂ© entre les marques «Bon AppĂ©tit!» et «Bon Apeti» (T-485/14). Le risque de confusion peut toutefois exister en prĂ©sence de signes faibles si les autres Ă©lĂ©ments ont un degrĂ© de caractĂšre distinctif infĂ©rieur ou aussi faible, et que lâimpression dâensemble est similaire.

Le sĂ©minaire sâest poursuivi avec le quatriĂšme et dernier exposĂ©, prĂ©sentĂ© par M. Burnier, Avocate Ă lâĂ©tude Pestalozzi, relatif aux moyens de preuve en procĂ©dure administrative, notamment au vu de la future procĂ©dure de radiation.
Me Burnier a tout dâabord rappelĂ© certains principes, notamment lâapplication de la maxime inquisitoire en matiĂšre administrative. En matiĂšre de procĂ©dure dâopposition, le TAF sâest toutefois Ă©cartĂ© de ce principe pour appliquer une procĂ©dure sui generis (TAF B-5120/2011), faisant peser la charge de la preuve sur les parties et excluant lâadministration de la preuve dâoffice. DâoĂč lâimportance pour les parties et leur reprĂ©sentant de produire des moyens de preuves Ă haute force probante. Cela sâapplique en particulier pour prouver la «vraisemblance» de lâusage ou du non usage (art. 35b al. 1 let. b et 24a let. d OPM rĂ©visĂ©s pour lâaction en radiation). Des exceptions Ă lâadministration des moyens de preuves existent lorsque le fait est admis par la partie adverse, notamment en cas de notoriĂ©tĂ© de la marque (sic! 2006, 177 «MĂ©dĂ©cins sans frontiĂšres»), en cas dâusage admis ou dĂ©faut dâusage retirĂ© (TAF B-5732/2009) ou encore en cas dâavis concordant des parties, ce qui lie lâautoritĂ© (sic! 2000, 111). Dans les autres cas, la «vraisemblance» doit ĂȘtre rapportĂ©e.
DĂšs lors, quid des moyens de preuve acceptables, et surtout efficaces, en procĂ©dure administrative? Les moyens de preuve les plus probants sont tout dâabord les documents Ă©crits dans lâune des langues officielles (sachant que lâanglais peut Ă©galement ĂȘtre admis), tels que, les factures, les bons de livraisons, les Ă©chantillons tels que les Ă©tiquettes, emballages, catalogues, prospectus, ou encore les listes de prix, nombre dâabonnĂ©s, nombre de tirages, les exemplaires de produits concernĂ©s, le matĂ©riel publicitaire et des indications relatives au chiffre dâaffaires ou aux dĂ©penses publicitaires engagĂ©es sur la pĂ©riode pertinente. Lors du dĂ©pĂŽt de documents, quelles que soient les procĂ©dures, il faut garer Ă lâesprit quâil est possible de consulter les dossiers des marques enregistrĂ©es, y compris le volet se rapportant Ă une procĂ©dure dâopposition. Il est dĂšs lors trĂšs important dâidentifier, lors du dĂ©pĂŽt, les documents qui sont confidentiels.
Par ailleurs, lâaccent peut aussi ĂȘtre mis sur les renseignements de tiers, tels que les rapports de recherches pour le non usage Ă©tabli par des sociĂ©tĂ©s spĂ©cialisĂ©es, des dĂ©clarations Ă©crites de tiers (fournisseurs, distributeurs) corroborĂ©es par leur tĂ©moignage, ce qui nĂ©cessite de demander lâaudition du tĂ©moin Ă lâautoritĂ© lors du dĂ©pĂŽt de la dĂ©claration. Lâaudition de tĂ©moins nâest toutefois possible quâauprĂšs du TAF (art. 14 PA). LâIPI admettant des dĂ©clarations de tiers en lien avec dâautres piĂšces, cette option reste toutefois intĂ©ressante en premiĂšre instance dĂ©jĂ . Burnier relĂšve quâil devrait aussi ĂȘtre possible de requĂ©rir de lâautoritĂ© (IPI ou TAF) quâelle sollicite elle-mĂȘme directement lâavis dâune association professionnelle pour prouver lâusage ou le non usage dâun signe par exemple.
Sâagissant des sondages dâopinion, se pose la question de leur valeur probante. Si le juge civil les considĂšre gĂ©nĂ©ralement comme une simple allĂ©gation de partie, ils sont en revanche particuliĂšrement appropriĂ©s en matiĂšre dâimposition dâun signe et de «secondary meaning», en particulier lorsque lâIPI collabore Ă lâĂ©laboration des questionnaires. Leur force probante devrait alors ĂȘtre Ă©quivalente Ă nâimporte quel autre moyen de preuve puisque les questions nâont pas Ă©tĂ© Ă©laborĂ©es par la partie requĂ©rante mais conjointement avec lâautoritĂ©. Ainsi, du moment oĂč le questionnaire repose sur des questions standards et usuelles, respecte les principes dĂ©gagĂ©s par la jurisprudence et est effectuĂ© par une sociĂ©tĂ© indĂ©pendante du demandeur, le sondage devrait avoir la mĂȘme force probante que les autres moyens de preuve.
De mĂȘme, le TAF considĂšre que les renseignements de parties tels que les dĂ©clarations du titulaire ou dâun reprĂ©sentant, mĂȘme faites sous serment, nâont pas de valeur accrue et sont qualifiĂ©es de simples allĂ©gations de parties (TAF B-3294/2013; B-5902/2013). Si cette pratique peut ĂȘtre suivie sâagissant des dĂ©clarations des parties stricto sensu, elle est fortement discutable sâagissant des dĂ©clarations de tiers, dont les dĂ©clarations Ă©crites devraient avoir une valeur probante «normale». En effet, ces tiers ne sont pas liĂ©s Ă la partie et leur tĂ©moignage Ă©crit doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme pertinent surtout lorsquâil est en lien direct avec des documents dĂ©posĂ©s en procĂ©dure. Les spĂ©cificitĂ©s de la procĂ©dure dâopposition et de la future procĂ©dure de radiation devraient encourager lâautoritĂ© Ă prendre en considĂ©ration ces dĂ©clarations et Ă ne plus systĂ©matiquement les rejeter.
Enfin, Burnier a clos son exposĂ© en rappelant que les frais Ă©taient allouĂ©s sous une forme forfaitaire, en particulier en procĂ©dure de premiĂšre instance. Elle sâinterroge sur lâopportunitĂ© de reconsidĂ©rer cette pratique, en particulier afin que les frais liĂ©s aux rapports de recherches, indispensables dans la future procĂ©dure de radiation, soient pris en charge.
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Fussnoten: |
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| * |
Juriste, GenĂšve. |
| ** |
Avocate, GenĂšve. |
