Le 9 novembre 2017 sâest tenu, Ă GenĂšve, le sĂ©minaire annuel organisĂ© conjointement par la License Executive Society Switzerland (LES-CH) et lâInstitut FĂ©dĂ©ral de la PropriĂ©tĂ© Intellectuelle (IPI) sur la thĂ©matique des «â DĂ©veloppements rĂ©cents en droit des marquesâ ».
Me Philippe GilliĂ©ron, avocat et Professeur Ă lâUniversitĂ© de Lausanne, rapporte une tendance Ă la baisse des recours portĂ©s devant le TAF, soit 66 en 2016 et 50 en 2017 avec un taux dâadmission relativement bas: 27 recours admis pour 38 rejetĂ©s (recours radiĂ©s ou non entrĂ©e en matiĂšre, 11 respectivement 40).
Me GilliĂ©ron a soulignĂ© lâimpact que peut avoir le libellĂ© des produits et services et a relevĂ© lâimportance que le TF accorde Ă lâindication gĂ©nĂ©rale (Oberbegriff) puisquâil a confirmĂ© la pratique selon laquelle il suffit que le motif dâexclusion sâapplique Ă une partie des produits ou des services tombant sous lâindication gĂ©nĂ©rale pour quâun signe soit exclu de lâenregistrement et ce mĂȘme si, pour certains, lâenregistrement aurait pu ĂȘtre admis au regard de lâart. 2 LPM (ArrĂȘt «â Car-Netâ » â classe 9, 12 et 38 â 4A_618/2016).
Me GilliĂ©ron a rapportĂ© les conclusions de deux arrĂȘts concernant les marques de position, dont lâarrĂȘt «â Louboutinâ » (4A_363/2016 et 4A_389/â2016). Par analogie avec les marques 3D, la position nâest pas considĂ©rĂ©e, en soi, comme un signe distinctif, mais elle doit pouvoir ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme inattendue, originale, ou comme marque imposĂ©e. Dans ces arrĂȘts, le TF a considĂ©rĂ© que cela nâĂ©tait pas le cas (semelle consistant en un Ă©lĂ©ment fonctionnel Ă©vident dâune chaussure [combinaison dâune couleur dĂ©terminante apposĂ©e sur la semelle de la chaussure nâest pas en soi inhabituel] et positionnement sur lampe de poche guĂšre original).
Me GilliĂ©ron sâest Ă©tonnĂ© de lâabsence dâun sondage dâopinion et se demande sâil ne faudrait pas considĂ©rer les cercles concernĂ©s dans chaque cas dâespĂšce. Selon lui, ce nâest pas la position qui devrait revĂȘtir un caractĂšre distinctif mais la combinaison du signe et de la position.
Ă propos de la marque dâagent (art. 4 LPM), Me GilliĂ©ron estime que câest avec raison que le Tribunal a rappelĂ© que lâagent a une obligation de loyautĂ© et de fidĂ©litĂ© vis-Ă -vis du titulaire, qui sâoppose Ă lâappropriation par lâagent de la marque du titulaire et que la dĂ©tention dâune participation minoritaire au sein dâune sociĂ©tĂ© nâentrainait aucune obligation de loyautĂ© et de fidĂ©litĂ© par cette sociĂ©tĂ© qui en ferait un agent susceptible de tomber sous le coup de lâart. 4 LPM lors dâun enregistrement de marque susceptible de lĂ©ser les droits du «â titulaireâ » (4A_489/2016).
Me GilliĂ©ron a ensuite prĂ©sentĂ© une rĂ©trospective des arrĂȘts du Tribunal administratif fĂ©dĂ©ral (TAF).
Il sâest penchĂ© tout dâabord sur lâart. 2 LPM.
Me GilliĂ©ron a exposĂ© un arrĂȘt quâil considĂšre comme potentiellement important pour les fĂ©dĂ©rations sportives et organisateurs de dits Ă©vĂ©nements, dans lequel il a Ă©tĂ© jugĂ© que le public comprend la dĂ©nomination comme un renvoi Ă lâĂ©quipe, sans sâattendre nĂ©cessairement Ă ce que lesdits produits soient fabriquĂ©s en Allemagne (B-1428/2016, «â Deutscher Fussball-Bund (fig.)â ».
Avec lâarrĂȘt «â Mindfuckâ » (B-883/â2016) le TAF a jugĂ© que ce signe Ă©tait propre Ă heurter les sentiments socio-Ă©thiques, moraux, religieux ou culturels dâune partie de la population (prise en compte des minoritĂ©s).
Dans lâarrĂȘt «â Salines Suissesâ » (B-6082/2015), le TAF a jugĂ© que le monopole Ă©tatique confĂ©rĂ© aux Salines de Bex, que le TAF a estimĂ© connu dâune large partie du public, entraine lâoctroi de droits exclusifs et le retrait desdites activitĂ©s Ă dâautres entreprises et quâĂ partir du moment oĂč aucune autre entreprise ne peut conduire des activitĂ©s identiques, il nâexiste aucun besoin absolu de libre disposition.
Me GilliĂ©ron a ensuite prĂ©sentĂ© les deux arrĂȘts «â Appleâ /â Musiknoteâ » (B-3088/2016) et «â iMessageâ » (B-2592/â2016) dans lesquels le TAF a rappelĂ© le degrĂ© dâattention Ă©levĂ© pour les produits des classes 9, respectivement 9, 38 et 42. Il a jugĂ© que lâicĂŽne (note de musique) en soi et le «â iâ » Ă©taient aisĂ©ment comprĂ©hensibles pour les produits, resp. services enregistrĂ©s. Pour le second cas, malgrĂ© lâabsence de force distinctive originale, le TAF a toutefois admis que les chiffres de ventes dâappareils sur lesquels lâapplication est installĂ©e est suffisant pour admettre le caractĂšre imposĂ© pour certains services de la classe 38.
Toujours pour la marque Apple, «â Touch IDâ » (B-7995/2015), le TAF a rappelĂ© que ce qui est important est la comprĂ©hension par le public suisse (expertise rendue par un expert de langue anglaise peu probant). Philippe GilliĂ©ron estime que la protection de ce type dâicĂŽne est difficile.
Dans deux arrĂȘts «â CeramTecâ » (B-5182/2015 et B-5183/2015), le TAF a jugĂ© la forme, resp. la couleur pas distinctive (la couleur monochrome pour des prothĂšses est usuelle). Le caractĂšre imposĂ© nâavait pas rĂ©ussi Ă ĂȘtre dĂ©montrĂ©, la preuve reposant sur un sondage menĂ© lors dâune foire de spĂ©cialistes en Allemagne ou seuls 8 sur 111 venaient de Suisse et aucun de Romandie ou du Tessin. Il nâavait pas non plus Ă©tĂ© Ă©tabli que les 99 spĂ©cialistes restants Ă©taient actifs en Suisse.
Me GilliĂ©ron a prĂ©sentĂ© lâarrĂȘt «â E-cockpitâ » (B-5048/2014) dans lequel le TAF a rappelĂ© le degrĂ© Ă©levĂ© dâattention pour les classes 9 et 42 et le degrĂ© dâattention moyen pour les classes 16 et 41, rejetant le recours pour les classes 9 et 42 refusĂ©es Ă la protection.
Dans lâarrĂȘt «â Cosmoparisâ » (B-7230/â2015), le TAF a confirmĂ© le refus de lâInstitut (art. 2 lit. c LPM), lâĂ©lĂ©ment «â Cosmoâ » ne parvenant pas Ă mettre en retrait lâĂ©lĂ©ment Paris, ville qui jouit dâune notoriĂ©tĂ© reconnue pour les produits concernĂ©s des classes 18 et 25.
Dans lâarrĂȘt «â Clos dâambonnayâ » (B-5004/2014), le TAF a confirmĂ© quâil est suffisant pour que lâarrĂȘt «â Montparnasseâ » soit applicable quâun signe soit enregistrĂ© pour les mĂȘmes produits et services dans lâEtat Ă©tranger dont provient le nom gĂ©ographique pour ne pas tomber sous le coup de lâart. 2 lit. a LPM, indĂ©pendamment de sa force ou son absence de force distinctive. Lâenregistrement dans le pays dâorigine a pour consĂ©quence que lâusage du signe est rĂ©servĂ© au titulaire, de sorte quâon ne saurait retenir un besoin de disposition en Suisse.
En relation avec lâart. 3 LPM, plusieurs arrĂȘts concernent le sujet de lâincorporation dâune marque antĂ©rieure dans une marque postĂ©rieure. Dans lâarrĂȘt «â Submarineâ /â Marinerâ » (B-922/â2015), le TAF a retenu la similaritĂ© des termes tant sur le plan visuel, sonore et sĂ©mantique, le risque de confusion rĂ©sultant de la reprise de la marque antĂ©rieure, aucune exception nâĂ©tant applicable.
Dans lâarrĂȘt «â Skyâ » et «â Sky TVâ /â Skybrandingâ » (B-1251), le TAF a confirmĂ© lâexistence dâun risque de confusion rĂ©sultant de la reprise de la marque antĂ©rieure, lâadjonction du terme branding nâĂ©tant pas suffisante.
Dans lâarrĂȘt «â Croco (fig.)â /â Miss Crocoâ » (B-2668/2016), le TAF a admis le risque de confusion en raison de la faible importance de lâĂ©lĂ©ment figuratif ainsi que de lâadjonction du terme «â Missâ » pour des produits au sujet desquels le degrĂ© dâattention est rĂ©duit (snacks et sucreries).
Dans lâarrĂȘt «â Estrella Galicia (fig.)â /â Estrella Damm Barcelona (fig.)â » (B-5226/2015), le TAF a confirmĂ© la dĂ©cision dâadmission de lâopposition Ă©mise par lâInstitut. Le TAF a considĂ©rĂ© que lâadjonction des Ă©lĂ©ments «â Dammâ » et «â Barcelonaâ » doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme faibles et donc impropres Ă exclure le risque de confusion rĂ©sultant de la reprise du terme «â Estrellaâ ». Me GilliĂ©ron a saluĂ© lâargumentation du TAF en ce que celui-ci a prĂ©cisĂ© quâil nâest pas besoin de rendre vraisemblable lâusage pour des produits autres que la biĂšre dĂšs lors que la biĂšre est similaire aux autres produits.
Dans lâarrĂȘt «â Joyâ /â enjoyâ » (B-5312/â2015), le TAF a considĂ©rĂ© que lâadjonction de «â enâ », au vu de la reprise de lâĂ©lĂ©ment «â Joyâ », nâĂ©carte pas un risque de confusion.
Me GilliĂ©ron a mentionnĂ© lâarrĂȘt «â Allianzâ /â Allianz TGA (fig.)â » pour les services en classe 37, 42. Le TAF a rappelĂ© que la renommĂ©e de la marque «â Allianzâ » en classe 36 ne lui profite pas pour les services des classes 37 et 42 et que lâĂ©lĂ©ment Allianz est en soi faible et que les Ă©lĂ©ments ajoutĂ©s sont suffisants pour exclure le risque de confusion rĂ©sultant de cette reprise.
Dans lâarrĂȘt «â Dona Esperanzaâ /â âAlejandro Fernandez, Esperanzaâ » (B-362/2015), le TAF a estimĂ© que nonobstant la reprise de lâĂ©lĂ©ment «â Esperanzaâ », effets sonores et sens des marques Ă©taient diffĂ©rents (prĂ©sence de lâĂ©lĂ©ment «â Donaâ » dans la marque opposante, «â Esperanzaâ » complĂ©tant le prĂ©nom fĂ©minin, tandis que la prĂ©sence dâune virgule dans la marque attaquĂ©e en fait un Ă©lĂ©ment sĂ©parĂ©, secondaire aux prĂ©noms et noms qui figurent en dĂ©but).
Dans lâarrĂȘt «â Ice watch (fig.)â /â Nice watchâ » (B-1481/2015), le TAF a admis le risque de confusion car la structure donnĂ©e aux marques est identique et le traitement graphique du point de la lettre «â iâ » est comparable.
Le TAF a estimĂ© quâil nây a de reprise en tant que telle de la marque antĂ©rieure et donc pas de risque de confusion (B-7106/2014, «â F1â /â Fione [fig.]â ») pour les classes 9, 35, et 42 (degrĂ© dâattention relativement Ă©levĂ©. Me GilliĂ©ron considĂšre dâune part que la conjonction de la reprise de la lettre «â Fâ », de «â oneâ » au milieu duquel se trouve lâĂ©lĂ©ment «â iâ » (rappelant le «â 1â ») revient Ă Ă©voquer dans lâesprit du public le signe «â F1â » et dâautre part, sâinterroge sur lâeffet de la force distinctive dont jouit une marque de haute renommĂ©e sur sa propension Ă renforcer lâassociation directe dans lâesprit du public Ă dâautres produits et services.
Dans lâarrĂȘt «â V. Green Gold (fig.)â /â âGreen Gold by Wassner (fig.)â » (B-7158/2016), le TAF a rejetĂ© le recours Ă lâencontre de la dĂ©cision de lâInstitut qui a admis partiellement lâopposition pour les mĂ©taux prĂ©cieux et rejetĂ©e pour le surplus. In casu, Green gold est descriptif et ne saurait entraĂźner un risque de confusion. Lâinterdiction de la reformatio in pejus a empĂȘchĂ© le TAF de rejeter intĂ©gralement lâopposition.
- â Dans ses conclusions, Me GilliĂ©ron a relevĂ© les trois arrĂȘts importantsâ
:
- â Marque de positionâ : arrĂȘt «â Louboutinâ » (ATF 143 III 127)
- â B-1428/2016, «â Deutscher Fussball Bund (fig.)â »
- â B-5004/2014, «â Clos Dâambonnayâ »
Arnaud Folliard-Monguiral, EUIPO, a prĂ©sentĂ© les nouveautĂ©s dans le contexte de la rĂ©forme lĂ©gislative du rĂšglement no 2015/2424 (codifiĂ© par rĂšgl. no 2017/1001), rĂšglement dĂ©lĂ©guĂ© no 2017/1430 et rĂšglement dâexĂ©cution no 2017/1431 Ă savoirâ :
- â Un nouveau type de marque (marque de certification)
- â De nouveaux types de marques (de position, de motif, de mouvement, multimĂ©dia etc.)
- â Un nouveau rĂ©gime pour lâinterprĂ©tation des intitulĂ©s de classe
- â De nouveaux motifs absolus de refus
- â De nouveaux motifs relatifs de refus (ex. AOP/IGP)
Arnaud Folliard-Monguiral, EUIPO a identifiĂ© plusieurs thĂ©matiquesâ :
La premiĂšre concerne lâimportance de lâidentification de la catĂ©gorie Ă laquelle appartient la marque. Le choix de la nature de la marque demandĂ©e dĂ©limite le champ de la protection de la marque.
(Trib. UE, 27 juin 2017, aff. T-580/15, «â Flamagas, SAâ /â Euipoâ », «â forme dâun briquetâ », pt 35â /â CJUE, 21 janvier 2016, aff. C-170/15 P, «â Enercon GmbHâ /â Euipoâ », pt 29).
Dans le cadre dâune marque dĂ©posĂ©e en tant que marque tridimensionnelle, le Tribunal a relevĂ© que lâĂ©lĂ©ment essentiel est lâĂ©lĂ©ment de forme et non lâĂ©lĂ©ment verbal. Arnaud Folliard-Monguiral a relevĂ© certains chevauchements entre marque figurative et marque de position. Une marque dĂ©posĂ©e comme marque figurative dont la description est quâil sâagit dâune marque de position, composĂ©e de deux bandes arquĂ©es au dĂ©veloppement circonfĂ©rentiel substantiellement Ă©gales apposĂ©es sur les francs du pneumatique. Au final, ce qui ressort est que la marque de position se confond avec le produit (ne se dĂ©tache pas des normes du secteur) (Trib. UE, 4 juillet 2017, aff. T-81/16, «â Pirelli Tyre SpAâ /â Euipoâ », «â forme dâun pneuâ », pt 23-24).
Dans lâaffaire prĂ©judicielle pendante C-163/16, «â Louboutin v. Van Haren Schoenen B.Vâ », dĂ©pĂŽt comme marque figurative avec la description: «â la marque consiste en la couleur rouge Pantone 18-1683TP appliquĂ©e sur la semelle dâune chaussure telle que reprĂ©sentĂ©e (le contour de la chaussure ne fait pas partie de la marque mais a pour but de mettre en Ă©vidence lâemplacement de la marqueâ ». Arnaud Folliard-Monguiral estime quâĂ supposer que la semelle rouge soit une caractĂ©ristique qui donne sa valeur substantielle au produit, il faudrait lâapprĂ©cier au jour du dĂ©pĂŽt de la marqueâ ; en effet, il ne faudrait pas pĂ©naliser «â Louboutinâ » pour les investissements quâil a effectuĂ©s pour vendre ses chaussures Ă âŹÂ 1000 et plus et le priver du succĂšs quâil a gĂ©nĂ©rĂ© par la vente de ses chaussures. Le fait que la marque soit aujourdâhui reconnue comme donnant une valeur substantielle, un prestige particulier au produit ne peut pas ĂȘtre retenu contre la marque, si Ă la date de son dĂ©pĂŽt, ce prestige nâexistait pas. Selon lui, on doit faire abstraction des efforts de promotions rĂ©alisĂ©s qui ont contribuĂ© Ă enrichir la marque.
Arnaud Folliard-Monguiral a exposĂ© ensuite trois types de marques diffĂ©rentesâ :
Marque individuelle â Marque de garantie â Marque collective
La question sur laquelle sâest penchĂ©e la cour de justice est celle de la fonction essentielle propre Ă chacune de ses marques.
En ce qui concerne la marque individuelle, dans un arrĂȘt (CJUE, 8 juin 2017, aff. C-689/15, «â W. F. Gözze Frottierweberei GmbHâ /â Verein Bremer Baumwollbörseâ »), la Cour a considĂ©rĂ© que lorsque lâusage dâune marque individuelle, tout en certifiant la composition ou la qualitĂ© des produits ou des services, ne garantit pas aux consommateurs que ces produits ou ces services proviennent dâune entreprise unique sous le contrĂŽle de laquelle ils sont fabriquĂ©s ou fournis et Ă laquelle, par consĂ©quent, peut ĂȘtre attribuĂ©e la responsabilitĂ© de la qualitĂ© desdits produits ou services, un tel usage nâest pas fait conformĂ©ment Ă la fonction dâindication dâorigine.
Arnaud Folliard-Monguiral a relevĂ© que cela peut conduire Ă des situations injustes dans la mesure oĂč les marques de garantie ont Ă©tĂ© introduites il y a peu de temps dans certains pays et que les titulaires de ces marques peuvent supporter les consĂ©quences graves dâune catĂ©gorisation de la marque qui ne correspond pas Ă son usage.
En ce qui concerne la marque collective, Arnaud Folliard-Monguiral a exposĂ© le cas «â Darjeelingâ », opposition entre une marque de produits de lingerie et marque collective dĂ©posĂ©e pour du thĂ© (CJUE, 20 sept. 2017, aff. C-673/15, «â The Tea Boardâ /â Euipoâ »). La Cour a jugĂ© que «â câest sans commettre dâerreur de droit que le Tribunal a jugĂ© que la fonction essentielle dâune marque collective de lâUnion europĂ©enne est de distinguer les produits ou les services des membres de lâassociation qui en est le titulaire de ceux dâautres entreprises, et non de distinguer ces produits en fonction de leur origine gĂ©ographique».
Selon Arnaud Folliard-Monguiral, lâorigine gĂ©ographique des produits nâest en effet, pas un critĂšre pertinent pour considĂ©rer que les produits seraient similaires.
Ainsi, la fonction essentielle de la marque collective est dâindiquer lâorigine commerciale des produits et non de distinguer ces produits en fonction de leur origine gĂ©ographique.
DĂ©termination trĂšs claire de la Cour de Justiceâ : marque individuelle, marque collectiveâ : fonction essentielle est la fonction de garantie dâorigineâ /â marque de certification a une fonction diffĂ©rente qui est celle de garantie de qualitĂ©.
Arnaud Folliard-Monguiral a Ă©voquĂ© deux problĂ©matiques, la premiĂšre concerne lâeffet non rĂ©troactif des arrĂȘts CJUE (19 juin 2012, aff. C-307/10, «â Chartered Institute of Patent Attorneysâ » (IP Translator) et 7 juill. 2005, aff. C-418/02, «â Praktikerâ »), avec la question de lâeffet rĂ©troactif de la nouvelle lĂ©gislation (Art. 33(5) et (8) RĂšgl. 2017/1001) ainsi que la problĂ©matique de lâimprĂ©cision du libellĂ© qui joue en dĂ©faveur du titulaire de la marque (Trib. EU, 6 avril 2017, aff. T-39/16, «â Nanu-Nanaâ /â Euipoâ » (§ 47-48).
Arnaud Folliard-Monguiral a poursuivi avec un arrĂȘt qui illustre la portĂ©e de protection des marques faibles et la reproduction dâun signe dans une marque plus rĂ©cente (Trib. UE, 27 juin 2017, aff. T-13/15, «â Deutsche Post AGâ /â Euipoâ », «â PostModernâ /â Postâ »). Le tribunal dit quâil nây a pas de risque de confusion ([§ 44] [âŠ]) le propre de la «â combinaison ludique et ingĂ©nieuseâ » des mots «â postâ » et «â modernâ » conduit, dans lâĂ©vocation du courant stylistique «â postmoderneâ » que permet le jeu de mots «â post modernâ », comme lâa constatĂ© Ă juste titre la chambre de recours, Ă un changement de signification desdits mots, le substantif «â postâ » devenant le prĂ©fixe «â postâ » avec une signification diffĂ©rente.
(§ 52) Du fait de sa nature ludique, la marque demandĂ©e, en tant que terme dâensemble usuel, forme ainsi une unitĂ© logique dans laquelle lâĂ©lĂ©ment «â postâ » nâa pas dâautonomie conceptuelle.
La portĂ©e de lâusage de la marque a Ă©tĂ© traitĂ©e dans une affaire dâaction en dĂ©chĂ©ance formĂ©e contre une marque de lâUnion qui dans les faits est utilisĂ©e uniquement en Italie (Trib. UE, 6 oct. 2017, aff. T-386/16, â «Falegnameria Universo dei F.lli Priarollo Sncâ /â Euipoâ »).
(§ 46) [âŠ] il nâest pas exclu que, dans certaines circonstances, le marchĂ© des produits ou des services pour lesquels une marque de lâUnion a Ă©tĂ© enregistrĂ©e soit, de fait, cantonnĂ© au territoire dâun seul Ătat membre. [âŠ]
(§ 52) Il sâensuit, au vu de lâensemble des considĂ©rations qui prĂ©cĂšdent, que la chambre de recours a considĂ©rĂ©, Ă juste titre, que, premiĂšrement, la documentation produite par la requĂ©rante, pour la pĂ©riode pertinente, ne justifiait un usage de la marque contestĂ©e que pour le seul territoire italien. DeuxiĂšmement, aucun usage hors du territoire italien, pour la pĂ©riode pertinente, nâa Ă©tĂ© documentĂ© par la requĂ©rante, contrairement Ă ce que laissait entendre la division dâannulation par lâemploi, dans sa dĂ©cision, de lâadverbe «â principalementâ ». TroisiĂšmement, les produits en cause ne prĂ©sentaient aucune spĂ©cificitĂ© territoriale justifiant que leur usage soit limitĂ© au seul territoire italien.
Arnaud Folliard-Monguiral sâest ensuite penchĂ© sur lâusage sous une forme modifiĂ©e.
Dans un premier cas, le tribunal donne raison Ă lâutilisateur (usage sur papier en tĂȘte avec adresse et avec un autre Ă©lĂ©ment â pas dâinteraction entre les deux) (Trib. UE, 18 juillet 2017, aff. T-110/16, «â Savant Systems LLCâ /â âEuipoâ » (marque verbale «â savantâ »)
(§ 32) En outre, la reprĂ©sentation de la marque en cause aux cĂŽtĂ©s des sous-marques de lâintervenante ne correspond pas Ă la situation dans laquelle la marque en cause est utilisĂ©e sous une forme qui diffĂšre de celle sous laquelle celle-ci a Ă©tĂ© enregistrĂ©e, mais bien Ă la situation oĂč plusieurs signes sont utilisĂ©s simultanĂ©ment sans altĂ©rer le caractĂšre distinctif du signe enregistrĂ©. Ainsi, il est possible que deux ou plusieurs marques fassent lâobjet dâun usage conjoint et autonome.
Dans un second cas, le tribunal a estimĂ© quâil y a une certaine interaction mais lâinteraction est minime car «â qualityâ » est faiblement distinctif et nâaffecte pas le caractĂšre distinctif de la marque (Trib. UE, 28 juin 2017, aff. T-287/15, «â Tayto Groupâ /â Euipoâ »).
(§ 34) LâĂ©lĂ©ment «â qualityâ », qui est situĂ© en dessous de la marque en cause, principalement sous lâĂ©lĂ©ment «â realâ », qui est Ă©crit en lettres capitales dans une taille de caractĂšres plus petite que celle de lâĂ©lĂ©ment verbal «â realâ » et qui est de couleur bleue, ne revĂȘt, quant Ă lui, quâun caractĂšre purement laudatif et est faiblement distinctif, ainsi que la chambre de recours lâa relevĂ© Ă bon droit. En outre, lâajout, dans la marque utilisĂ©e, de la stylisation sous forme dâĂ©tiquette, dans laquelle tant les Ă©lĂ©ments de la marque en cause que lâĂ©lĂ©ment «â qualityâ » sont insĂ©rĂ©s, prĂ©sente un caractĂšre purement ornemental, dĂšs lors quâil est situĂ© en arriĂšre-fond de la marque en cause et occupe de la sorte une position accessoire, ce qui ne lui confĂšre pas de caractĂšre distinctif propre.
Dans un troisiĂšme cas, «â Cactusâ », marque enregistrĂ©eâ : Ă©lĂ©ment verbal cactus avec Ă©lĂ©ment figuratif cactus. Lâusage de lâĂ©lĂ©ment figuratif seul ne modifie pas le caractĂšre distinctif de la marque (C-673/15 P & C-676/15P «â Cactusâ »).
Compte tenu de la coĂŻncidence dans le contenu conceptuel du mot et de lâobjet quâil reprĂ©sente, lâusage de lâĂ©lĂ©ment figuratif seul suffit. Arnaud Folliard-Monguiral se rĂ©jouit de cette jurisprudence gĂ©nĂ©reuse envers les utilisateurs.
Dans une affaire concernant la question de lâaltĂ©ration du caractĂšre distinctif dans le cas dâune marque tridimensionnelle utilisĂ©e avec un Ă©lĂ©ment verbal dessus (Trib. UE, 10 octobre 2017, aff. T-211/14 RENV, «â Toni Klementâ /â Euipoâ »), le tribunal a jugĂ© que lâusage de la marque verbale avec la marque tridimensionnelle ne modifie pas la forme, car il sâagit dâun cas utilisation conjointe et autonomeâ ; on perçoit toujours la marque de forme indĂ©pendamment de la marque qui est accolĂ©e dessus.
Arnaud Folliard-Monguiral a terminĂ© son exposĂ© en Ă©voquant deux affaires de modĂšles (CJUE, 21 septembre 2017, aff. C-361/15P, «â Easy Sanitary BVâ /â Euipoâ »).
Lâaffaire concerne un drain pour douche composĂ© de deux Ă©lĂ©mentsâ : une cuve et une plaque de recouvrement. Le demandeur en annulation se fondait en particulier sur un catalogue dans lequel on voyait une plaque de recouvrement. La Cour de justice confirme quâon ne peut pas comparer un produit complexe composĂ© de deux Ă©lĂ©ments, (la cuve et la plaque de recouvrement) avec un seul de ses Ă©lĂ©ments (plaque de recouvrement).
Quid de lâImportance du secteur industrielâ ? Drain pour douche Ă usage domestique et cuve dâĂ©vacuation Ă usage industriel. La Cour de Justice dit que cela nâa pas dâimportance pour lâexamen de la nouveautĂ©. Par le simple fait que le modĂšle antĂ©rieur a Ă©tĂ© divulguĂ© dans un secteur industriel A. on doit considĂ©rer quâil est Ă©galement valable et opposable au titre de caractĂšre individuel dans un secteur industriel B. mĂȘme si les secteurs industriels sont diffĂ©rents.
Olivier Veluz, juriste en marque sĂ©nior Ă lâIPI, a regrettĂ© quâil nây ait pas encore eu de dĂ©cisions dans le cadre de cette procĂ©dure de radiation. Un des facteurs de la longueur de la procĂ©dure est lâĂ©change dâĂ©critures double avec des prolongations de dĂ©lai.
Olivier Veluz a tout dâabord prĂ©sentĂ© quelques chiffres. Il y a eu 42 demandes introduites entre le 1er janvier et le 31 octobre 2017, presque autant de marques suisses (26 procĂ©dures) que dâenregistrements internationaux (16 procĂ©dures), dont 19 titulaires sont domiciliĂ©s Ă lâĂ©tranger avec les difficultĂ©s de la notification Ă lâĂ©tranger exposĂ©es plus loin.
Olivier Veluz a ensuite prĂ©sentĂ© les expĂ©riences des notifications Ă lâĂ©tranger notamment en Australie, en Allemagne, en France, aux Pays-Bas, en Chine, aux Ătats-Unis dâAmĂ©rique et en Belgique.
La notification de lâacte par lequel on invite une personne Ă dĂ©signer un reprĂ©sentant en Suisse est un acte de puissance publique uniquement si lâĂtat en question tolĂšre lâacte (Convention de La Haye relative Ă la signification et la notification Ă lâĂ©tranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matiĂšre civile ou commerciale).
Pour presque toutes les procĂ©dures (sauf 2 rĂ©glĂ©es par notification informelle), lâInstitut fĂ©dĂ©ral de la propriĂ©tĂ© intellectuelle (IPI) a dĂ» faire appel Ă la notification formelle. Pour les pays comme la France, les Pays-Bas et les Etats-Unis qui tolĂšrent la notification directe par voie postale, lâIPI a pu faire une notification directe par un courrier recommandĂ© avec accusĂ© de rĂ©ception.
Pour lâAustralie et lâAllemagne par exemple, lâIPI a dĂ» faire appel Ă la notification formelle (Entraide via lâOFJ), procĂ©dure plus longue (ex, Australieâ : notification formelle: initiĂ©e le 18 avril 2017â ; acte notifiĂ© par lâAustralie le 17 juillet 2017â ; rĂ©cĂ©pissĂ© des autoritĂ©s australiennes reçu le 4 septembre 2017).
Olivier Veluz a abordĂ© deux questions de procĂ©duresâ :
Selon lâart. 23 al. 4 OPM, lâIPI peut suspendre la procĂ©dure dâopposition lorsque la dĂ©cision concernant lâopposition dĂ©pend de lâissue dâune procĂ©dure de radiation pour dĂ©faut dâusage, dâune procĂ©dure civile ou de toute autre procĂ©dure.
Dans une dĂ©cision incidente du TAF (B-3788/2017 du 30 aoĂ»t 2017), celui-ci a rejetĂ© la demande de suspension de la procĂ©dure de recours suite au dĂ©pĂŽt dâune demande de radiation pour dĂ©faut dâusage. Le TAF a estimĂ© que la procĂ©dure de radiation avait un objet diffĂ©rent de celui de la procĂ©dure dâopposition et que la demande de radiation ne concernait quâune partie des produits et services et que cela nâavait aucune incidence sur la procĂ©dure de radiation. Le TAF considĂšre cette dĂ©cision comme un «â Einzelfallâ »
Dans un cas similaire, Olivier Veluz prĂ©cise que lâIPI suspendrait une telle procĂ©dure, mĂȘme en cas de demande de radiation partielleâ : elle aura toujours une incidence sur le champ de protection sur la marque opposante et Ă©galement sur le risque de confusion puisquâil dĂ©pend du degrĂ© de similaritĂ© des produits et services.
Olivier Veluz a prĂ©sentĂ© les moyens de preuve dĂ©jĂ reçus dans les procĂ©dures en coursâ :
- â Rapport de recherches dâusage (pĂ©riode de recherches Ă©tendue)
- â Extrait de recherches Google (ponctuelles ou avec archives Internet (Wayback Machine))
- â Extrait du registre du commerce (la faillite du titulaire nâest quâun indice du non-usage et non une vraisemblance du non-usage)
Olivier Veluz a citĂ© lâarrĂȘt «â Bentleyâ » important pour la question du dĂ©faut dâusage (TC-FR (102 2015 287) du 22 aoĂ»t 2017) dans lequel le tribunal fribourgeois a considĂ©rĂ© que le dĂ©faut dâusage constatĂ© par lâIPI dans une dĂ©cision sur opposition permet de rendre vraisemblable le dĂ©faut dâusage dans une procĂ©dure civile en nullitĂ© confrontant les mĂȘmes parties (consid. 3.2). Selon Olivier Veluz, lâIPI ne devrait pas arriver Ă une conclusion diffĂ©rente dans une procĂ©dure de radiation.
Olivier Veluz a rappelĂ© quâEric Meier dans les Ă©ditions prĂ©cĂ©dentes avait indiquĂ© que lâIPI avait une pratique diffĂ©rente du TAF en la matiĂšre. Lors des workshops, lâIPI avait informĂ© les participants que lâIPI avait dĂ©cidĂ© de changer de pratique. Olivier Veluz profite de ce sĂ©minaire pour expliquer quelles Ă©taient les bases de rĂ©flexion pour le dĂ©veloppement de cette nouvelle pratique Ă lâaide de 5 exemples.
Le thĂšme de lâusage partiel sera abordĂ© en 4 pointsâ :
- â La problĂ©matique
- â Raisonnement en deux Ă©tapes
- â Raisons de la nouvelle pratique
- â Solution minimale Ă©tendue de lâIPI
Olivier Veluz a rappelĂ© la teneur de lâart. 11 LPM concernant lâusage de la marqueâ : la protection est accordĂ©e pour autant que la marque soit utilisĂ©e en relation avec les produits ou les services enregistrĂ©s.
1er exempleâ : dans le cadre dâune marque enregistrĂ©e pour une catĂ©gorie trĂšs large (cl. 19: MatĂ©riaux Ă bĂątir non mĂ©talliques).
Usage rendu vraisemblable pour des Parquets Ă lames larges (Landhausdielen). Quel est lâeffet de cet usage partiel.
1Ăšre étapeâ : est-ce que lâusage de la marque est couvert par ce qui figure au registre.
Dans lâexemple concernant la dĂ©cision no 14159, «â Yoâ /â Yokaâ », Cl. 32: BiĂšresâ ; eaux minĂ©rales et gazeuses et autres boissons non alcooliques; boissons de fruits et jus de fruits; sirops et autres prĂ©parations pour faire des boissons.
Usage rendu vraisemblable pour des Sirops de fruits avec différents arÎmes et sirops sans autres précisions.
2Ăšme étapeâ : dans ce cas, lâIPI est arrivĂ© Ă la conclusion que lâusage est couvert uniquement pour les sirops et autres prĂ©parations pour faire des boissons (par la question de la subsomption). En effet, un sirop nâest pas quelque chose que lâon consomme tel quel mais qui sert Ă prĂ©parer une boisson.
Quâen est-il de lâeffet de lâusage partiel lorsque lâon est en prĂ©sence dâune liste qui comprend beaucoup de produits. Oliviez Veluz a prĂ©sentĂ© les trois solutions possibles Ă savoir la solution minimale, (usage rendu vraisemblable uniquement pour les Parquets Ă lames larges (qui Ă©tait la pratique de lâIPI jusquâau 31 dĂ©cembre 2016), la solution maximale, lâusage pour un simple produit permet de valider lâusage pour toute lâindication gĂ©nĂ©rale (Ă savoir MatĂ©riaux Ă bĂątir non mĂ©talliques), ou alors une solution intermĂ©diaire, la solution minimale Ă©tendue. Dans le cadre de la solution intermĂ©diaire, Ă savoir la solution minimale Ă©tendue, Olivier Veluz identifie trois approches possiblesâ :
Pratique du TAF (Jurisprudence «â Gadovistâ » (B-5871/2011), qui correspond Ă la doctrine majoritaire (Marbachâ /â Volkenâ /â Wang), lâusage valide le droit Ă la marque pour lâindication gĂ©nĂ©rale lorsqueâ :
- â usage futur prĂ©sumĂ© et attendu par les destinataires
- â usage prototypique pour lâindication gĂ©nĂ©rale
- â indication gĂ©nĂ©rale dĂ©finie de maniĂšre Ă©troite et prĂ©cise
- â assortiment courant dâun «â fournisseurâ » (Anbieter) typique de la branche.
Pratique allemande Jurisprudence «â Cynarettenâ » (BPatG 25 W (pat) 52/02) et «â Culinariaâ » (BGH I ZR 85/11), lâusage valide le droit Ă la marque pour des produits relevant de la «â mĂȘmeâ » catĂ©gorie de produits ou services (aus dem «â gleichenâ » Bereich).
CatĂ©gorie de produits et services qui concordent quant Ă leurs propriĂ©tĂ©s, ainsi quâĂ leur but et Ă leur destination.
Pratique EUIPOâ /â T-UE Jurisprudence «â Aladinâ » (T-UE T-126/03) et «â Respicurâ » (T-UE T-256/04), lâusage pour un produit spĂ©cifique appartenant Ă une catĂ©gorie plus large de produits valide le droit Ă la marque pour la sous-catĂ©gorie autonome à laquelle ce produit spĂ©cifique appartient, les sous-catĂ©gories autonomes Ă©tant dĂ©finies au regard de la finalité et de la destination des produits.
La nouvelle pratique de lâIPI est due Ă lâintroduction au 1er janvier 2017 de la nouvelle procĂ©dure de radiation pour dĂ©faut dâusage: lâusage partiel a un effet direct sur le registre, et la question de lâusage partiel ne peut pas ĂȘtre laissĂ© ouverte. LâIPI a ainsi choisi de dĂ©velopper une pratique qui tient compte des solutions EUIPO/T-UE et des tribunaux allemands, Ă savoir une solution minimale Ă©tendue (TAF B-6249/2014, consid. 4.6, «â Campagnolo (fig.)â /â F.LLI Campagnolo (fig.)â »â : approche du TAF correspond Ă la solution minimale Ă©tendue du droit allemand).
La casuistique est Ă©tablie depuis 2003 et implique une meilleure prĂ©visibilitĂ© des dĂ©cisions ainsi quâune «â harmonisationâ » des pratiques des membres de lâUnion europĂ©enne. Oliviez Veluz prĂ©cise que dans la mesure oĂč ces cas sâapparentent Ă des case law, qui dĂ©pendent de ce qui est inscrit au registre, pour quels produits la marque est utilisĂ©e et les conclusions des parties, tous les cas de figure ne sont pas couverts par la jurisprudence UE, il faudra voir lâĂ©volution de la pratique de lâIPI ainsi que la jurisprudence du TAF et TF.
Ainsi, lâIPI va dorĂ©navant procĂ©der Ă cette analyse dans chaque cas. A certaines conditions, lâusage pour un produit spĂ©cifique valide le droit Ă la marque pour lâindication gĂ©nĂ©rale qui lâenglobe. LâIPI nâutilise pas les critĂšres de la similaritĂ© des produits et services de lâart. 3 al. 1 let. b et c LPM, qui sont trop vastes, lâIPI nâutilise pas non plus le critĂšre de leur lieu de fabrication ou de distribution habituel, qui est plutĂŽt un critĂšre de la similaritĂ© des produits.
Olivier Veluz a prĂ©cisĂ© ce quâĂ©tait une Indication formulĂ©e en des termes larges et sous-catĂ©goriesâ : elle recouvre une indication/catĂ©gorie qui regroupe une vaste gamme de produits ou services ou qui comprend des produits ou services par nature diffĂ©rents. Ainsi, le droit Ă la marque ne peut sâĂ©tendre quâĂ des produits ou services suffisamment diffĂ©renciĂ©s pour pouvoir constituer des catĂ©gories ou sous-catĂ©gories de produits ou services cohĂ©rentes, ces catĂ©gories ne pouvant ĂȘtre divisĂ©es sans arbitraire (Directives IPI, Partie 5, ch. 5.4.5.2).
LâIPI procĂšde Ă lâanalyse selon le schĂ©ma suivantâ : Ă certaines conditions, lâusage pour un produit spĂ©cifique valide le droit Ă la marque pour lâindication gĂ©nĂ©rale quâil englobe.
Tout dâabord, lâIPI fait la subsomptionâ : on a comme rĂ©sultat de la subsomption une catĂ©gorie formulĂ©e en des termes plus ou moins large. Si elle est suffisamment cohĂ©rente pour former un tout, (pas de subdivision possible), lâeffet de lâusage partiel est Ă©tendu Ă cette catĂ©gorie gĂ©nĂ©rale. En revanche, si une sous catĂ©gorisation est possible, on la dĂ©finit avec une mini-Subsomption et on examine sous quelle catĂ©gorie le produit tombe et on va vĂ©rifier si cette sous-catĂ©gorie est suffisamment cohĂ©rente ou non et ainsi de suite.
Olivier Veluz a indiqué quels sont les critÚres pour délimiter les sous-catégories.
Produits ou services qui concordent dâun point de vue objectif quant Ă leurs propriĂ©tĂ©s, leur finalité et leur destination (Directives, Partie 6, ch. 5.4.5.2). Ce sont des critĂšres primordiaux, car le consommateur recherche avant tout un produit ou un service qui pourra rĂ©pondre Ă ses besoins spĂ©cifiques, ils sont essentiels dans lâorientation du choix du consommateur, appliquĂ©s prĂ©alablement Ă tout achat (T-UE 256/04 § 29, «â Respicurâ »)
Les critĂšres de la propriĂ©tĂ©, de la finalitĂ© et de la destination peuvent ĂȘtre dĂ©finis par les questions suivantesâ : Ă quoi sert le produit ou le serviceâ ? Et pourquoi ou dans quel but le produit ou le service est-il acheté en principe du point de vue de son destinataire final?
Olivier Veluz a fourni quelques exemplesâ :
- â MĂ©dicaments Ă base de tamsulosine utilisĂ©s dans le traitement des symptĂŽmes de lâhyperplasie bĂ©nigne de la prostate â mĂ©dicaments dans le domaine de lâurologie (TAF B-2678/2012, «â Omixâ /â âOnyx Pharmaceuticalsâ »)
- â CD et DVD enregistrĂ©s â supports enregistrĂ©s (Chambre de recours EUIPO R 1932/2014-2, «â Celluloid Recordsâ /â Celluloidâ »)
- â DĂ©cision dâopposition n° 14159 «â
Yoâ
/â
Yokaâ
ȉ
:
Marque enregistrĂ©e en cl. 32â : BiĂšres; eaux minĂ©rales et gazeuses et autres boissons non alcooliques; boissons de fruits et jus de fruitsâ ; sirops et autres prĂ©parations pour faire des boissons.Usage rendu vraisemblable pourâ : Sirops de fruits avec diffĂ©rents arĂŽmes et sirops sans autres prĂ©cisions.Effet de lâusage partiel: Sirops et autres prĂ©parations pour faire des boissons.
- â DĂ©cision dâopposition n° 14368 «â
biancaâ
/â
biancalunaâ
»
Marque enregistrĂ©e en cl. 25â : VĂȘtements.Usage rendu vraisemblable pourâ : VĂȘtements pour femme, Ă savoir pantalons, chemisiers, vestes, t-shirts, blazers et jupes et Ă©charpes.Effet de lâusage partielâ : VĂȘtements de dessus pour femme et Ă©charpes.Ceci correspond Ă la jurisprudence europĂ©enne (T-UE T-392/04, «â Manouâ /â Manu Manu Manuâ », T-UE Tâ 336/16, «â Versaceâ »â : vĂȘtements de luxe â sous-catĂ©gorie autonome
- â DĂ©cision dâopposition no 13â
680,«â
Paradixâ
/â
Rouge du Paradisâ
»
Marque enregistrĂ©e en cl. 33â : Alcools et eaux-de-vie, liqueurs, spiritueux et apĂ©ritifs divers.Usage rendu vraisemblable pourâ : Eaux-de-vie de vin bĂ©nĂ©ficiant de lâAOC Cognac.Effet de lâusage partielâ : Eaux-de-vie de vin, brandy, eau-de-vie de marc de raisin et eau-de-vie de raisin sec.Origine gĂ©ographique â critĂšre pertinent (cf. Ă©g. T-UE T-489/13 «â Villa Alberi (fig.)â /â V Viña Alberdiâ »)LâIPI sâest servi de la lĂ©gislation suisse qui prĂ©voit des catĂ©gories trĂšs spĂ©cifiques.
- â DĂ©cision dâopposition no 14384 «â
tiloâ
/â
Tilagâ
»
Marque enregistrĂ©e en cl. 19â : MatĂ©riaux Ă bĂątir non mĂ©talliques.Usage rendu vraisemblable pourâ : Parquet Ă lames larges.Effet de lâusage partiel: RevĂȘtement de sol dâintĂ©rieur en bois.
- â DĂ©cision dâopposition n° 14138 «â
IPADâ
/â
MI PADâ
»
Marque enregistrĂ©e en cl. 9â : Ordinateurs, matĂ©riel informatique (âŠ)Usage rendu vraisemblable pourâ : Tablettes informatiques.Effet de lâusage partielâ : Ordinateurs portables.Peut-on faire des sous-catĂ©gories pour les ordinateurs portablesâ ? Si on regarde la rĂ©alitĂ© du marchĂ©, ce nâest pas justifiĂ© de faire des sous-catĂ©gories.= prise en compte de ce qui existe sur le marchĂ© (ultra-portable)â crĂ©er des sous-catĂ©gories artificielles (cf. Ă©g. Chambre de recours EUIPO R 1010/2016-4, «â VIETAâ »)
Olivier Veluz a conclu en prĂ©cisant que depuis le 1er janvier 2017, lâIPI a rendu environ une quinzaine de dĂ©cisions et le critĂšre de lâusage partiel figure maintenant dans lâaide Ă lâexamen.
Selon Me Michele Burnier il existe des dispositions dans le CPC (intĂ©rĂȘts dignes de protection des parties [art. 156 et 163 al. 2 CPC]), dans la PA (intĂ©rĂȘts privĂ©s importants [art. 27 al. 1 let. b et 27 al. 2 PA] et prise en considĂ©ration des piĂšces tenues secrĂštes [art. 28 PA] ainsi que dans les lois spĂ©ciales, dans la LBI (sauvegarde du secret de fabrication ou dâaffaires [art. 68 LBI], et mesures provisionnelles [art. 77 al. 1 let. b et al. 3 LBI].
Me Burnier renvoie pour la dĂ©finition du secret Ă la publication de Me Schlosser. La notion de secret est une disposition large qui englobe aussi les droits de la personnalitĂ©, des parties et des tiers. Elle retient la dĂ©finition du Tribunal FĂ©dĂ©ralâ :
«â Constitue un secret, au sens de ces dispositions, toute connaissance particuliĂšre qui nâest pas de notoriĂ©tĂ© publique, qui nâest pas facilement accessible, dont un fabricant ou un commerçant a un intĂ©rĂȘt lĂ©gitime Ă conserver lâexclusivitĂ© et quâen fait il nâentend pas divulguer. [âŠ] Par secrets de fabrication, on entend les recettes et moyens de fabrication qui ne sont pas publics et qui revĂȘtent une grande valeur pour le fabricant; par secrets commerciaux, on entend la connaissance de sources dâachat et de ravitaillement, et celles relatives Ă lâorganisation, la calculation du prix, la publicitĂ© et la productionâ ». ATF 103 IV 283; cf. Ă©galement TF 2C_1009/2014 et une dĂ©finition plus restrictive en droit du travail «â Pour ĂȘtre qualifiĂ©es de secrets dâaffaires ou de fabrication, les connaissances acquises au sein de lâentreprise doivent toucher Ă des questions techniques, organisationnelles ou financiĂšres, qui sont spĂ©cifiques et que celle-ci veut garder secrĂštes; il ne peut sâagir de connaissances qui peuvent ĂȘtre acquises dans toutes les entreprises de la mĂȘme branche ».
Câest une notion qui est subjective au domaine en question, notamment dans le monde du droit du travail.
Parmi les diverses mesures de sauvegarde visant Ă sauvegarder les secrets, on peut citer notamment le caviardage des documents, la consultation au greffe et lâinterdiction de lever des copies, lâinterdiction Ă une partie de participer Ă lâaudition dâun tĂ©moin, lâengagement Ă©crit de garder le secret sous la menace de la peine prĂ©vue Ă lâart. 292 CP. Dans la pratique en ce qui concerne le caviardage, Michele Burnier prĂ©conise dâenvoyer deux exemplaires au juge dont un seul est caviardĂ© afin que le juge ait les informations nĂ©cessaires.
Dans la mesure oĂč la sauvegarde dâun secret limite le droit dâĂȘtre entendu, le secret est Ă interprĂ©ter restrictivement, la vraisemblance de lâexistence dâun secret devrait suffire selon la doctrine. Un recours au TF est possible contre une ordonnance de preuves rendue par le juge, sâil y a un risque de prĂ©judice irrĂ©parable.
Me Burnier a soulignĂ© que les mesures de sauvegarde prĂ©conisĂ©es sont similaires (TF 1A.241/2003, 5A_361/2010 et TAF A-1936/2006 (rĂ©sumĂ© de rapports), anonymisation (VPB 67 (2003) N 59), mais que la jurisprudence semble exiger un intĂ©rĂȘt prĂ©pondĂ©rant (ĂŒberwiegend) plutĂŽt quâun intĂ©rĂȘt important (wesentlich) à garder le secret (27 PA).
Disposition dans les lois spĂ©cialesâ :
Art. 36 al. 3 OPMâ : Lorsquâun document justificatif contient des secrets de fabrication ou dâaffaires, il est, sur demande, classĂ© Ă part. Ce fait est mentionnĂ© dans le dossier.
Art. 65 LBIÂ et 89 al. 2 OBI
Art 65â : AprĂšs la publication de la demande de brevet, toute personne peut consulter le dossier. Le Conseil fĂ©dĂ©ral ne peut limiter ce droit de consultation que lorsque des secrets de fabrication ou dâaffaires ou dâautres intĂ©rĂȘts prĂ©pondĂ©rants sây opposent.
Art. 89 al. 2â : Celui qui joint aux piĂšces un titre probant et dĂ©clare que celui-ci divulgue des secrets de fabrication ou dâaffaires peut demander quâil soit classĂ© Ă part. Lâexistence de tels titres est mentionnĂ©e dans le dossier. Art. 27 al. 2 LDes et 22 al. 2 ODes.
Art. 27 al. 2â : Le dossier des designs enregistrĂ©s peut Ă©galement ĂȘtre consultĂ©. Le Conseil fĂ©dĂ©ral ne peut restreindre le droit Ă la consultation du dossier quâĂ la condition que le secret de fabrication ou dâaffaires ou dâautres intĂ©rĂȘts prĂ©pondĂ©rants sây opposent.
Art. 22 al. 2â : Les titres probants contenant des secrets de fabrication ou dâaffaires ainsi que dâautres informations, Ă la non-divulgation desquels le dĂ©posant a un intĂ©rĂȘt lĂ©gitime, sont classĂ©s Ă part sur requĂȘte. Ce classement Ă part est mentionnĂ© dans le dossier.
Me Burnier a enfin posĂ© la question de lâapplicabilitĂ© future de la LPD rĂ©visĂ©e et son incidence sur le droit de la consultation ainsi que de lâapplicabilitĂ© de la Ltrans avant de passer la parole Ă Me Schlosser qui a passĂ© en revue la question de la formulation des conclusions au travers de plusieurs arrĂȘts. Il a soulignĂ© lâimportance de ces conclusions qui doivent ĂȘtre suffisamment prĂ©cises.
Le TAF a prĂ©cisĂ© que les conclusions en interdiction doivent dĂ©crire avec prĂ©cision le comportement dont le demandeur sollicite lâinterdiction. La partie visĂ©e doit comprendre ce quâelle nâest plus en droit de faire et les autoritĂ©s dâexĂ©cution ou les autoritĂ©s pĂ©nales doivent savoir quels actes elles doivent empĂȘcher ou assortir de sanctions (ATF 131 III 70 consid. 3.3, «â Sammelhefterâ »).
Sont irrecevables (le cas Ă©chĂ©ant partiellement) les conclusions comprenant les Ă©lĂ©ments suivants car elles ne sont pas suffisamment prĂ©cisesâ : « et toute autre dĂ©nomination susceptible de crĂ©er un risque de confusion avec le signe Y », «â seule ou avec des adjonctions dĂ©pourvues de force distinctiveâ », «â utiliser Ă titre de signe distinctifâ » (CR PI, art. 55 LPM N 5â ; SHK MSchG, art. 55 N 37).
Dans lâarrĂȘt TF, 5A_658/2014, «â Carl Hirschmannâ », le tribunal a estimĂ© que «â si le litige porte sur lâinterdiction de communications futures, on ne peut exiger du demandeur quâil formule des conclusions dans lesquelles il anticipe et prĂ©cise jusque dans les moindres dĂ©tails le texte par lequel lâentreprise de mĂ©dias menace de porter atteinte Ă sa personnalité⠻.
Me Burnier sâest ensuite penchĂ©e sur la lĂ©gitimation active et passive dans les groupes de sociĂ©tĂ©s. Elle a rappelĂ© que la lĂ©gitimation active et passive (ou respectivement la qualitĂ© pour agir) dĂ©pend toujours de la nature et de lâobjet de lâaction intentĂ©e et que les dispositions des lois spĂ©ciales (LPM, LBI, LDes, LDA) prĂ©voient plusieurs types dâactions (en interdiction, en cessation, en fourniture de renseignements, rĂ©paratrices, en nullitĂ©, en confiscation, en cession) pour lesquelles la lĂ©gitimation peut considĂ©rablement varier.
En ce qui concerne la lĂ©gitimation en procĂ©dure dâopposition, Me Burnier a Ă©voquĂ© une dĂ©cision (TAF B-6608/â2009) selon laquelle dans le cadre dâun usage au sein dâun groupe de sociĂ©tĂ©s, lâopposition est irrecevable car la licence a Ă©tĂ© octroyĂ©e aprĂšs le terme du dĂ©lai dâopposition (Ă©galement TAF B-5165/â2011). Par ailleurs, la «â lĂ©gitimation activeâ » est une condition de recevabilitĂ© qui, si elle fait dĂ©faut Ă lâĂ©chĂ©ance du dĂ©lai dâopposition, conduit à «â lâirrecevabilitĂ© de lâoppositionâ ».
Dans le cadre de la procĂ©dure administrative dâinvalidation, la lĂ©gitimation active est donnĂ©e Ă toute personne qui peut dĂ©poser auprĂšs de lâIPI une demande de radiation de la marque pour dĂ©faut dâusage au sens de lâart. 12 al. 1 LPMâ ; il nâest pas nĂ©cessaire de justifier dâun intĂ©rĂȘt particulier. La lĂ©gitimation active en procĂ©dure civile varie en fonction de la nature de lâaction. Dans le cadre de lâaction en constatation (ATF 136 III 102, «â Yelloâ »), le TF a prĂ©cisĂ© que la constatation du demandeur ne doit pas ĂȘtre restreinte aux mĂȘmes classes de produits ou de services que celles pour lesquelles le demandeur a fait inscrire un signe dans le registre des marques. Dans un arrĂȘt du TF (sic! 2017, 311), il a Ă©tĂ© prĂ©cisĂ© dans le cadre de la lĂ©gitimation passive de lâaction en exĂ©cution que lâutilisation dâune marque protĂ©gĂ©e par un tiers ne signifie pas que celle-ci se fait avec le consentement du titulaire, mĂȘme si le tiers est membre du mĂȘme groupe de sociĂ©tĂ©.
Me Schlosser a ensuite prĂ©sentĂ© plusieurs arrĂȘts concernant lâexpertise privĂ©e, qui est un moyen de preuve admissible en procĂ©dure administrative. Toutefois, la valeur probante est en gĂ©nĂ©ral moindre que celle dâune expertise judiciaire. En effet, dans une expertise privĂ©e, la partie soumet Ă lâexpert une prĂ©sentation subjective des faits litigieux et lâexpert ne sâexpose pas Ă des sanctions pĂ©nales. En ce qui concerne la force probante dâun sondage dâopinion, il dĂ©pend avant tout de la formulation des questions (TAF, B-5169/2011, 17 fĂ©vrier 2012, consid. 5.3, «â Oktoberfest-Bierâ »).
Avant lâentrĂ©e en vigueur du CPC en 2011, lâexpertise privĂ©e Ă©tait un moyen de preuve admissible (SG, AG, AI). Dans un arrĂȘt, le TF a estimĂ© quâen favorisant une expertise privĂ©e par rapport Ă lâautre, le juge sâest fondĂ© sur une simple allĂ©gation de partie dans une matiĂšre faisant appel Ă des connaissances techniques spĂ©cialisĂ©es (ATF 132 III 83 consid. 3.5). Aujourdâhui, le CPC ne mentionne pas lâexpertise privĂ©e parmi les moyens de preuve (art. 168 al. 1). Dans son message du 28 juin 2006, le Conseil fĂ©dĂ©ral a indiquĂ© que lâexpertise privĂ© nâest pas un moyen de preuve, mais reste admissible, en tant quâallĂ©gations dâune partie, aux conditions de recevabilitĂ© de celle-ci.
Pour certains auteurs, lâexpertise privĂ©e devrait ĂȘtre admise comme moyen de preuve, dont la valeur probante serait apprĂ©ciĂ©e librement par le juge (cf. art. 157 CPC) (F. Trezziniâ /â âF. Bohnet, RSPC 2017, 367 ssâ ; D. RĂŒetschi, inâ : FS Meisser, spĂ©c. 14). TF, 4A_128/2012, «â Vogueâ »). Ralph Schlosser souligne quâen matiĂšre de PI, pour les sondages dâopinion lâexpert a une crĂ©dibilitĂ© et on peut y attacher une certaine importance.
Me Schlosser a fait rĂ©fĂ©rence Ă lâarrĂȘt Vogue (TF, 4A_128/2012) qui mentionne «â Câest Ă juste titre que lâautoritĂ© cantonale sâest rĂ©fĂ©rĂ©e, Ă titre dâindices, Ă une enquĂȘte dĂ©moscopique rĂ©alisĂ©e Ă la requĂȘte des demanderesses, la mĂ©thodologie suivie par lâinstitut de sondage nâayant pas Ă©tĂ© remise en causeâ ». Dans lâarrĂȘt «â Smartiesâ » (ATF 131 III consid. 7.2), le TF admet que lâimposition puisse ĂȘtre dĂ©montrĂ©e moyennant un sondage pour autant que celui-ci soit concluant par rapport aux personnes interrogĂ©es et Ă la mĂ©thode employĂ©e.
Il est recommandĂ© toutefois de produire le rapport dâexpertise privĂ©e et de le citer de maniĂšre dĂ©taillĂ©e dans lâĂ©criture, de requĂ©rir lâaudition de lâauteur du rapport en qualitĂ© dâexpert-tĂ©moin et de requĂ©rir subsidiairement une expertise judiciaire (SHK MSchG-Kaiserâ /â RĂŒetschi, Beweisrecht N 28).
Me Schlosser a conclu avec un arrĂȘt tout rĂ©cent pour illustrer la pratique nuancĂ©e en matiĂšre de droit des marques dans le cadre dâune action en nullitĂ© de marque pour dĂ©faut dâusage (TF, 4A_299/2017, «â Abankaâ /â âAbancaâ ») «â les expertises privĂ©es peuvent, avec dâautres indices, fournir la preuve dâun fait. Cela est dâautant plus vrai lorsque le fait doit ĂȘtre simplement rendu vraisemblableâ » (consid. 4.1). Ainsi, le dĂ©faut dâusage est rendu vraisemblable par un rapport de recherche, mais aussi par la preuve de lâabsence de filiale et de personnel en Suisse et lâinterrogatoire de la dĂ©fenderesse dont est rĂ©sultĂ© le constat dâabsence de rĂ©clame en Suisse.
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Fussnoten: |
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Lic. jur. LL.M en droit europĂ©en, Juriste auprĂšs de lâinstitut FĂ©dĂ©ral de la PropriĂ©tĂ© Intellectuelle (IPI). |